Le Point Rouge de la Démocratie Participative

24 avril 2015 10 h 35 min

Depuis plusieurs mois maintenant, les Parisiens sont appelés à voter en ligne pour l’arrivée d’une nouvelle pratique citoyenne : la Démocratie participative. C’est l’occasion de choisir certains investissements dans les quartiers parisiens. John Paul, entouré de passants, de chercheurs et d’élues ouvre le débat pour comprendre les origines, le fonctionnement, mais aussi les risques de cette nouvelle expérience démocratique.

La défiance envers les politiques n’a jamais été aussi massive qu’aujourd’hui. Certains s’en délectent en dénonçant le « tous pourris » ou pour se proclamer le seul recours; d’autres cherchent des solutions pour proposer aux citoyens une nouvelle forme de démocratie plus concrète, plus directe. Née à Porto Alegre au Brésil, la démocratie participative est aujourd’hui un espoir d’efficacité de l’action publique et de réconciliation possible avec la politique. Mais attention, rien n’est gagné, car la démocratie, c’est du boulot!

« Je veux faire de Paris la ville qui porte la plus grande ambition de démocratie participative au monde »

C’est ce que Anne Hidalgo déclarait en mars 2014 lors de sa présentation du budget participatif place de la République à Paris. Singulier projet, ambitieux, mais qui a aussi ses pièges.

La démocratie participative, ça vient d’où ?

Dès le début des années 1960, des critiques de la démocratie représentative émergent et un désir nait chez les électeurs-citoyens du monde entier, de prendre part aux décisions qui les concernent. Restait alors à penser les outils de la participation, dont les premiers balbutiements sont mis à l’essai en Allemagne et aux Etats-Unis au début des années 1970, avec les jurys-citoyens et le tirage au sort.

Puis c’est à Porto Alegre au Brésil que la démarche prend de l’ampleur, après des décennies de dictature. La mise en place du premier budget participatif en 1989 nourrira alors l’inspiration des altermondialistes venus se rassembler dans cette ville devenue symbole, pour le premier Forum Social Mondial, en 2001.

Réappropriation du politique, démocratie participative et budget participatif deviennent ainsi les trois pendants d’une même réalité, sous-tendue par un même objectif : voir éclore un monde nouveau, pour, et par les citoyens.

Aujourd’hui en France (et ailleurs), la méfiance envers les hommes et les femmes politiques grandit. « Tous pourris ! » s’exclame un passant, comme pour porter la voix de la majorité des habitants du quartier de la Porte de Vanves, où plus de la moitié n’ont pas voté aux élections municipales. « Alors oui, les gens votent FN ! », finit-il par dire dans un haussement d’épaules résigné.

Mais en parallèle à cette méfiance, cette haine parfois, un mouvement se développe, salutaire, porté par les mêmes désirs qu’à Porto Alegre. Si les citoyens ne se sentent pas bien représentés par leurs élus, une solution : leur participation à la gouvernance. Réfléchir à nos besoins, discuter des priorités, décider en fonction des budgets, mais aussi contrôler l’action de nos élus.

L’essai parisien

A Paris, depuis 13 ans, on teste diverses formes de participation des habitants : Charte Parisienne de la Participation, dispositif d’interpellation du Maire, Commission parisienne du débat public… En 2002, c’est au tour des Conseils de quartier de naitre. Des habitants se regroupent et tentent tant bien que mal de décider des changements de leur arrondissement. Mais toujours confrontés à la « real politique » venue du dessus, il leur est souvent impossible d’agir. Ainsi, pour Elisabeth Dau, chercheure à l’Institut de Recherche et débat sur la Gouvernance, les Conseils de quartier sont « nés d’une volonté de mettre en place la démocratie participative, mais peuvent parfois être considérés comme le degré zéro de la démocratie participative ». Et puis aussi, ceux qui s’investissent dans ces Conseils de quartier ont souvent le même profil : des hommes, le plus souvent retraités, et rarement issus des couches populaires de la population.

Alors cette année à Paris, la volonté d’élargir la démocratie participative est affirmée. En plus d’interdire aux élus de devenir président des Conseils de Quartier (c’est déjà le cas dans certains arrondissements, comme le 14e), 5% du budget total sur la mandature sera participatif. Autrement dit, sur six ans, les parisiens décideront directement du sort de 426 millions d’euros pour des projets de proximité dans les arrondissements, ainsi que pour des projets de plus grande envergure (jusqu’au Grand Paris). Une première mondiale de cette ampleur !

projets participatifs pour paris 1

Concrètement ?

Pour la première année, et pour sensibiliser les parisiens à ce nouveau mode de fonctionnement, les projets sont proposés par la Ville, puis votés par les citoyens. Pour la prochaine session, ces derniers pourront prendre directement des initiatives, se concerter et proposer des projets d’investissement pour leur quartier.

Le comité des arrondissements sera consulté pour l’adoption, d’ici la fin de l’année 2014, d’une procédure commune pour la mise en place de ce budget participatif au niveau des arrondissements. Les associations possèderont également un rôle important, notamment pour la phase décisive d’expertise des projets proposés.

Une jolie aventure politique et citoyenne en perspective, mais avec toutes ses embûches possibles bien sûr… dont la plus importante : des habitudes à bouger, tant au sein de la grande machine politique que chez les citoyens.

Alors, citoyens de Paris, vous pouvez voter en ligne à partir du 24 septembre 2014 et jusqu’au 1er octobre ce que vous désirez que deviennent les 5% du budget participatif, et contribuer ainsi aux prémices de ce que sera, peut être, la Politique de demain…

Il paraît que « les parisiens sont mûrs pour cela », c’est Madame la maire qui l’a dit…

Flore Viénot

Les invités

  • Elisabeth Dau, chercheure à l’IRG (institut de recherche et débat sur la gouvernance)
  • Pauline Véron, adjointe à la Maire de Paris, chargée de la démocratie locale, la participation citoyenne, la vie associative, la jeunesse et l’emploi
  • Carine Petit, maire du 14e
  • Fabrice Burdèse, artiste du quartier et d’ailleurs
  • Charlotte Naton, présidente du Conseil de Quartier de la Porte de Vanves
  • Francis Tournois, Ciné-Kino, Conseil de quartier de la Porte de Vanves
  • Les habitants du quartier

    Une émission présentée et réalisée par
    JOHN PAUL LEPERS

    Enquête
    Flore Viénot

    Image
    Vincent Massot
    Mickael Royer
    Thibault Pomares

    Montage
    Antoine Conort

    Responsable Technique
    Larry Waxman

    Moyens Techniques
    LaTéléLibre

    Drone Générique
    Nicolas Bertin-Mourot

    Musique
    Romain Dudek

    Production
    Charles Dayot

    Remerciements
    Les habitants de la Porte de Vanves
    Alain Goric’h
    Mélissa Genevois

    Des Liens

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